HORS-SOL
Été comme hiver, des vagues humaines déferlent sans cesse sur le parvis de la cathédrale de Milan. Parmi la foule, B., 48 ans fait parti d’un groupe de déracinés, qui proposent aux touristes des clichés souvenirs avec ceux que l’on surnomme «les rats du ciel». Pour chaque image, une main pleine de pitance suffit à rameuter les centaines de pigeons de la place. Si certains se prêtent au jeu volontiers d’autres les regardent avec horreur. Mais une chose est sûre, entre ces hommes et les oiseaux qu’ils ont apprivoisés se cache une complicité par mimétisme à travers un échange de bons procédés. Une bienveillance et une solidarité unies face à l'imaginaire collectif du parasitisme.
La série Hors-sol cherche à mettre en évidence les similitudes du processus d’animalisation que subissent certaines populations humaines et non humaines. Par un discours raciste et spéciste, cette idéologie invisible consiste à dissocier les êtres humanisés (reconnus comme égaux) des êtres animalisés (reconnus comme inégaux), en les rejetant de l’autre côté de la frontière.
« Les politiques migratoires, pour renforcer leur légitimité, mobilisent l’imaginaire animalier. Autrement dit, pour faire naître au sein des populations nationales une détestation des personnes exilées, ces politiques puisent dans notre détestation des animaux en semant le doute quant au fait que ces personnes soient véritablement humaines. Ce sont des discours de légitimation des politiques publiques qui, nous le voyons bien, mêlent spécisme, racisme, sexisme et classisme. »